Non à cette cacophonie constitutionnelle, la France mérite mieux !
Il est toujours très difficile de s’extraire d’un contexte émotionnel. Un homme politique responsable doit pourtant tout faire pour conserver son libre arbitre, pour que ses prises de position, et ses prises de décisions, ne soient pas simplement le reflet d’une émotion ou d’une influence particulière.
En bref, il doit prendre le recul nécessaire pour ne pas tomber, comme l’a fait le gouvernement tout au long de ces dernières semaines, dans une forme d’improvisation juridique permanente.
Comment aujourd’hui imaginer réformer la constitution du pays, le texte majeur de notre république, et le faire sereinement, au lendemain d’attentats sanglants et barbares, en plein cœur d’un état d’urgence proclamé…et qu’on propose de prolonger ?
L’émotion est légitime. Elle ne doit pas, elle ne peut pas, servir de prétexte à une opération politique, à une loi de circonstance, qui monopolise l’activité parlementaire pendant plusieurs semaines alors que, dans le même temps, nous faisons face à une crise économique et sociale sans précédent qui frappe toutes les couches de notre société !
Sur le fond on voit bien la difficulté de justifier aujourd’hui des propositions qu’on rejetait naturellement et violemment il y a encore si peu de temps. Sous un gouvernement de droite, le président du groupe socialiste aurait été le plus farouche adversaire de cette réforme inutile, inefficace et dangereuse. Inutile puisque, la période récente l’a démontré, l’arsenal législatif antiterroriste actuel est largement suffisant. Inefficace car aucun terroriste ne se posera la question d’une éventuelle perte de nationalité, quand il est prêt à mourir en martyr. Et dangereuse car elle divise les Français sur la conception même de la Nation.
Si cette réforme constitutionnelle, après des tractations qui n’auront pas grandi leurs auteurs, finit par être adoptée aux forceps, les Français seront-ils mieux protégés ? La démocratie y aura-t-elle gagnée ?
Et faut-il que nous continuions jour après jour à abandonner une à une toutes les valeurs qui ont fait de la gauche cette formidable volonté de justice et d’égalité qu’elle a su être dans notre histoire ?
Cette initiative ressemble de plus en plus fortement à une erreur, voire à une faute politique, qui n’aura comme conséquence que de faire progresser encore un peu plus les idées de la droite et de l’extrême droite, après être passé d’une réaction citoyenne digne et respectueuse à une vulgaire opération politicienne basée sur la peur et le rejet.
L’image de la France, pays des Droits de l’Homme, n’en ressortira pas grandie aux yeux du monde.
En conscience, je voterai contre cette manœuvre indigne de notre République.