Interview Ouest France: “Fier de mon mandat !”

Au lendemain de cette défaite, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Déçu. C’est une vraie déception parce que je suis fier de mon mandat. Je n’ai pas été un député godillot. Les gens ont eu du mal à comprendre que je quitte le PS : pour eux, être loyal, c’est l’être envers un homme, un appareil. Moi, j’ai été loyal envers des idées et des valeurs.

Pour vous, votre défaite est donc directement liée à votre décision de quitter le Parti socialiste en 2015 ?
Ça a sûrement joué. Je ne suis pas issu du sérail politique, je n’ai pas les codes des barons locaux. La ligne politique du PS pour cette élection, c’était de faire tomber Noguès. JeanYves Le Drian doit jubiler de ma défaite. Mais je n’ai pas de leçon à recevoir de ces gens.

Vous n’avez pas pour autant cédé aux sirènes d’ En Marche…
Certains élus sont allés à la soupe, moi je peux me regarder dans une glace. Cela ne me ressemble pas de changer de parti quinze jours avant les élections. Je préfère perdre sur mes valeurs que gagner par calcul électoral.

Pendant la campagne, vous avez répété que vous étiez « le seul capable de garder la circonscription à gauche ». N’était-ce pas totalement illusoire à l’heure où LREM rebattait les cartes du jeu politique ?
LREM tente de créer un parti démocrate à l’américaine. Je crois que la culture française a besoin d’une droite et d’une gauche. Elles doivent se refonder. Plein de nouveaux mouvements vont émerger de l’échec probable d’Emmanuel Macron.

Vous ne mâchez pas vos mots envers LREM, vous parliez même dimanche soir du « syndrome des moutons ». Plutôt violent pour les électeurs.
On a élu un président libéral décomplexé. Ce gouvernement va créer une désillusion rapide, ça commencera par les retraités. Ceux qui vont être élus députés LREM ont signé un serment d’allégeance. Ils vont montrer leur vrai visage après les législatives : on aura un Parlement à la botte de l’exécutif, qui votera sans sourciller. Il est là le syndrome du mouton. A quoi sert un député dans ces conditions ? Représentant du président de la République avant d’être représentant du peuple…

Dans la 6e circonscription, vous aviez fait de la lutte contre les projets miniers dans le CentreBretagne votre cheval de bataille, notamment contre le Permis exclusif de recherches de mines (Perm) de Silfiac. Des projets validés par Emmanuel Macron…
Je devenais le politique emblématique de ce combat. C’est Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, qui a accordé à Variscan Mines le droit de forer. Nous avions été reçus avec des maires du secteur par son cabinet. Il nous disait que rien ne se ferait sans l’accord des populations. Mais Macron est profondément pour ces forages. Jean-Michel Jacques pense que ce ne sont pas des combats très importants. Mais aujourd’hui, les associations s’inquiètent.

Quelles ont été vos erreurs lors de ce mandat ?
Je n’ai pas été assez loin dans mon ambition de refaire le lien entre le nord et le sud de la circonscription. Les élus de Roi Morvan communauté et de Pontivy communauté ne connaissent pas ceux de Lorient Agglo. Sur la question des mines, c’est un problème. Les Lorientais se désintéressent du dossier alors que le Blavet et le Scorff passent chez eux et pourraient être pollués par l’exploitation minière. J’ai passé beaucoup de temps dans le Nord par exemple pour la lutte contre la fermeture de l’hôpital de Guémenésur-Scorff. J’étais là où c’était le plus urgent, où les gens avaient un sentiment d’abandon.

Quels souvenirs garderezvous de ce mandat « agité » et comment voyez-vous l’avenir ?
Ça a été passionnant. J’ai participé au vote de belles lois comme celle sur le devoir de vigilance des multinationales envers les atteintes aux droits humains et aux libertés fondamentales. C’est fini : je veux juste remercier les gens qui ont voté pour moi. L’avenir pour le moment, ce sera du repos. J’ai besoin de digérer. Ça me fait peur cette coupure brutale. Je n’ai jamais autant travaillé que lors de ces cinq années. Peut-être que j’écrirais là-dessus…

Recueilli par Marie CAROF-GADEL.

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